Vers une mort clinique
En cas de contre performance contre Le Havre, tout à l'heure à la Meinau, le Racing risque fort de basculer dans le vide. Une relégation inédite en National aurait des conséquences désastreuses pour le club plus que centenaire, pas du tout préparé à cette catastrophe. Rien ne dit qu'il pourrait s'en remettre. Explications.
Depuis sa prise de fonction, voilà deux mois, Jean-Claude Plessis n'a de cesse de le répéter : « En cas de descente, il n'y a pas de plan B. Tout le travail en vue de la prochaine saison serait remis en cause, et sévèrement... »
Au regard de la situation sportive, devenue franchement crispante depuis la déroute de mardi à Guingamp (2-0), l'ex-président sochalien aurait peut-être dû se montrer plus prévoyant. Car aujourd'hui, le scénario du pire n'est plus du tout à exclure.
Si l'équipe de Pascal Janin tombe en National, le Racing ne s'en remettrait peut-être pas. D'un point de vue sportif, bien sûr, mais aussi social et financier, la chute s'apparenterait à un cataclysme sans précédent. Les conséquences seraient en tout cas bien plus graves que lors d'une « simple » relégation de L 1 en L 2.
A la Meinau, quarante-cinq
employés sont suspendus
aux résultats des Bleus
Le National, championnat atypique aux confins du professionnalisme et de l'amateurisme pur, ressemble à une terre inhospitalière où l'incertitude est de mise. « Il faut savoir que les recettes baissent de moitié et donc que le budget doit être divisé par deux, explique Alain Plet.
L'ancien directeur administratif du Racing, durant l'ère Gindorf-Keller, sait de quoi il parle. Arrivé voilà quelques jours au chevet d'Amiens, relégué lors de l'ultime journée en mai dernier et actuel 11e du National, Plet est aussi passé par Rodez, petit club familial du troisième échelon national.
« Quand la structure n'est pas trop lourde, comme à Amiens, la pilule est moins dure à avaler, poursuit Plet. On est passé de 9 millions d'euros de budget à 4,7. Nous fonctionnons avec sept salariés dans les bureaux et vingt-trois pros sur le terrain. Mais pour une grosse machine comme le Racing, c'est autre chose... »
A la Meinau, où quelque quarante-cinq employés - hors joueurs - sont suspendus aux résultats de l'équipe, on comprend que l'inquiétude gagne du terrain. Les immanquables coupes sombres dans les effectifs ont de quoi faire frémir. Si vingt emplois peuvent être préservés, selon les prévisions les plus optimistes, ce serait déjà un miracle.
Des bus-couchettes plutôt
que des avions de ligne
A Reims, autre équipe tombée de L 2 l'an dernier, mais en passe de reprendre l'ascenseur vers l'étage supérieur, il a fallu resserrer la ceinture de plusieurs crans. En dépit d'une affluence remarquable pour le niveau - 8 000 spectateurs de moyenne à Auguste-Delaune, contre une ou deux centaines à Cassis-Carnoux ou Luzenac -, le président a chiffré à « 67% les pertes de revenus, notamment en raison du manque à gagner lié aux droits télé ».
A l'instar de Troyes, troisième recalé du dernier exercice, et contrairement à Amiens, Reims s'est malgré tout donné les moyens de ne pas végéter en National. Quelques joueurs du niveau L 2, dont Cédric Fauré, 22 buts au compteur, ont consenti à une baisse substantielle de salaire et renoncé au confort auquel ils étaient habitués pour s'embarquer dans cette aventure incertaine.
Les déplacements à l'autre bout de la France en bus-couchettes sont devenus courant, ceux en avion de ligne rares. « Psychologiquement, c'est un championnat éprouvant pour les pros, explique Gérard Kancel, confrère à l'Union qui a suivi la saison du Stade de Reims. Les attaquants sont moins protégés, l'arbitrage est compliqué. L'intérêt médiatique est pour ainsi dire nul. Mais la pression est grande. Si l'équipe ne remonte pas tout de suite, le club est mort. »
En cas de dépôt de bilan,
le professionnalisme
aurait vécu
Au Racing, la mort clinique pourrait fort bien être prononcée dès l'annonce de la relégation. Trop « gros » pour s'engouffrer dans l'étroit couloir qui mène au National, certainement incapable d'honorer ses dettes et de financer un plan social, le club devrait s'empresser de déposer le bilan, s'exposant ainsi à une rétrogradation administrative en... CFA.
Le professionnalisme aurait alors vécu. Quand on sait que personne n'a élaboré de plan B, il y a de quoi trembler.
Séb.K.
Édition DNA du Ven 7 mai 2010
Dernière édition par Zebra68 le Mer 2 Jan 2013 - 12:28, édité 2 fois