DNA a écrit:Jafar Hilali: «Tout pour empêcher un dépôt de bilan»
Alors que l’incertitude plane, Jafar Hilali aborde les sujets qui fâchent. Sans ménager les susceptibilités, le président de la SASP ne semble pas décidé à laisser la place.
– La SASP que vous présidez, et l’association se livrent une guerre ouverte. Pourquoi refusez-vous toute discussion?
– L’association a dénoncé la convention dans le seul but de nous faire du chantage au numéro d’affiliation comme elle l’a fait avec les dirigeants précédents et avec nous l’an dernier.
Nous avons averti à plusieurs reprises M. Spielmann (de visu, par téléphone…) que l’on n’acceptait pas ses méthodes. L’association ne cherche pas à aider la section pro, c’est une évidence.
Dès le départ, j’ai proposé la solution qui aurait évité tout ce cirque: le transfert de l’argent (un peu plus de 600 000 euros) en échange d’un solde de tout compte qui aurait réglé les erreurs du passé – bizarrement validées par les commissaires aux comptes, notamment Jean-Brice de Turckheim, qui semble être le conseiller de M. Spielmann –, la non-refacturation à la SASP de ces employés exclusivement à la disposition du centre.
Ma proposition a été rejetée et nous devons passer par la voie légale. La justice, à la différence des politiques, se basera sur la convention et les faits. Nous attendons une première réponse ce mardi.
L’association ne nous a jamais invités à aucune réunion de travail sur la nouvelle convention. Au final, et c’est un comble, l’association a proposé la même convention, floue d’après elle, à un jour de la date butoir. Ses revendications n’ont rien à voir avec les intérêts du centre et du club: le seul souci, c’est qu’il n’y ait pas de poursuites judiciaires au regard des malversations qu’on a dénoncées.
«La Mairie, principal problème»
– Quel regard portez-vous sur le rôle de la Mairie ?
– Elle est paradoxalement devenue le principal problème. Elle veut jouer un rôle d’arbitre que personne à la SASP ne lui a demandé.
Nous avons l’impression que les leçons n’ont pas été retenues après l’appel surréaliste du Tire-Bouchon, qui nous a obligé à choisir à contrecœur un président sympathique mais complètement « has been » (ndlr : Jean-Claude Plessis) qui a fait le choix de garder Pascal Janin et qui a composé l’essentiel de l’équipe de la première partie de saison.
– Quelles solutions envisagez-vous?
– Je me pose une question simple. À quoi sert-il de garder un centre de formation avec un budget de 2,5 millions d’euros soit celui de trois quarts des clubs en National?
J’ai proposé à Alain Dreyfus, le président du FC Mulhouse d’utiliser le stade de l’Ill, entièrement pris en charge par la ville de Mulhouse. Il a accepté l’idée. J’ai été jusqu’à proposer une association pour créer un grand club alsacien que je souhaite renommer Racing Club de Strasbourg-Mulhouse avec un centre de formation à Strasbourg et un stade gratuit à Mulhouse. À quoi sert-il de jouer à la Meinau alors que c’est un gouffre financier, qui coûte plus de 2 millions d’euros?
Cette réalité économique pénalise la qualité de l’équipe première. Pas un seul club en National ne paye ou n’entretient son stade à part à Strasbourg.
Alain Fontanel est un énarque brillant mais il ne faut pas oublier que la politique sportive de la Mairie parle d’elle-même. Nous ne cherchons pas à polémiquer mais nous souhaitons que les ingérences du politique dans la SASP, cessent une fois pour toutes. Je ne parle même pas de la sortie saumâtre dans la presse de M. Herrmann qui a dû oublier sa gestion passée du Racing. Pourtant je reste convaincu que les élus veulent bien faire.
– Votre inflexibilité pourrait laisser croire à une volonté d’aboutir au dépôt de bilan pour faire porter la responsabilité de la faillite aux autres?
– Nous demandons à l’association de nous rembourser ce qu’elle doit. Nous n’avons jamais souhaité le dépôt de bilan. Avec les 7 millions que j’ai investis comment pourrait-on l’imaginer ? Comme je le dis à Laurent Fournier, je pense que la montée en L2 est possible. Moi j’y crois.
Nous avons dès le départ pris le soin d’alerter tout le monde sur la politique de Patrick Spielmann qui coïncide bizarrement avec le retour de Léonard Specht dans le conseil d’administration de l’association. Nous connaissons les tenants et les aboutissants du club et de l’association. Nous n’avons jamais cherché à mettre la pression. Mais nous avons décidé de ne pas nous laisser faire.
– Les salaires des joueurs et des employés seront-ils payés pour le mois d’avril?
– Nous allons assurer la trésorerie jusqu’à la fin de la saison. La troisième procédure d’alerte sera levée, comme les autres, vous le verrez. Ce club a encore beaucoup de richesses même si le défaitisme règne. Je pense notamment aux UB90, des jeunes manipulés, devenus la honte du foot alsacien. Heureusement qu’il existe d’autres familles de supporters dans ce club.
«La critique est facile»
– Votre absence de Strasbourg, assez mal perçue par les joueurs, n’est-elle pas une forme de fuite ?
– D’après Sikimic, les joueurs se sentent seuls alors qu’ils ont le coach, le staff, les vrais supporters, le directeur général et moi-même derrière eux. C’est un peu fort non ? À la place de Laurent, je n’aurais pas pris Sikimic comme capitaine. Mais il fait comme il veut.
Notre implication est de 300%. La critique est facile mais nous sommes là et bien là. Il existe quelques légers retards de paiement mais le nécessaire sera fait, notamment quand Patrick Spielmann cessera de bloquer les fonds en accord avec notre budget prévisionnel.
Nous refusons de cautionner les graves erreurs du passé. Je reste convaincu qu’une solution va être trouvée rapidement. Nous ferons tout pour empêcher un dépôt de bilan même si nous devons être les seuls à vouloir la survie du club.
– La convocation devant la DNCG mercredi pourrait aboutir à la rétrogradation du club. Avez-vous des solutions pour l’empêcher ?
– Mais de quelle rétrogradation parlez-vous? Nous sommes simplement, au même titre que Grenoble, convoqués pour faire un point sur cette situation abracadabrantesque. Le club a encore beaucoup d’actifs qui vont nous permettre d’assurer sa pérennité.
– Le refus de signer des contrats avec les jeunes prometteurs du club ne constitue-t-il pas la preuve de votre désengagement ?
– Absolument pas. Nous avons dit à l’association que nous ne pouvions pas envisager de financer une année supplémentaire le centre de formation. Nous avons proposé des solutions de financement lors d’une réunion en janvier que nos interlocuteurs n’ont pas voulu approfondir. À partir d’un moment, les positions doivent être assumées. Que les choses soient claires, nous ne sommes pas la banque du centre de formation.
Pour votre information, en 15 ans, le centre a coûté 45 millions d’euros et n’a rapporté que 28 millions. C’est à la LAFA de s’occuper de la formation des jeunes de la région. Que fait M. Gemmrich à part critiquer comme tout le monde la direction actuelle. Trop c’est trop. Ce travail dans le club, il fallait le faire. Tout le monde le sait et jamais personne n’a osé s’attaquer à son mal profond.
– La somme de 10 millions d’euros que vous avez estimée pour vendre le club est-elle bien raisonnable ?
– Ce qui est navrant, mais symptomatique est que les seuls Alsaciens qui souhaitent racheter le Racing voudraient le faire après une liquidation judiciaire. Depuis mars, l’une de mes sociétés financières, Carousel Finance SA détient 100% de F.C. Football Capital Ltd, la holding de contrôle de la SASP. J’invite donc les investisseurs à discuter directement avec moi, sans passer par la Mairie, car il n’y a pas de droit de préemption avec Carousel Finance SA que je suis disposé à vendre.
Concernant la somme de 10 millions, c’est d’abord les 7 millions que j’ai déjà investis, dont 3,5 millions d’euros de compte courant que nous pensons abandonner, ce qui n’est pas encore fait.
Cela dépendra de mon accord lors d’une prochaine AG, nécessaire afin d’équilibrer les comptes du Racing pour cette saison sportive afin de maintenir le club au moins en National, de la plus-value sur Gameiro qui rapportera potentiellement plus de 3 millions, du potentiel vente de joueurs que nous estimons à plus de 4,3 millions et de la marque qui est estimé à 1,8 millions d’euros… Où est donc le prix exorbitant ?
Recueillis par Fr.N.- DNA du 02/05/2011